Bioule (82) - Réhabilitation d'un chateau médiéval pour accueillir une ecole primaire

Occitanie
Tertiaire
Brique de terre cuite
Bâtiment classé au titre des monuments historiques

Ce château du XIIIe siècle en briques de terre cuite est situé au cœur du village de Bioule dans le Tarn-et-Garonne (82). 
Afin de conserver et d’améliorer l’activité scolaire au sein de ce bâtiment historique, la mairie a entrepris en 2010 de réaliser une réhabilitation partielle, tout en assurant la continuité pédagogique de cette école implantée dans le château de Bioule depuis la fin du XIXème siècle.

Le bâtiment et son contexte

 

 

 

uyyyr

Figure 1: Le château de Bioule sur les berges de l’Aveyron. (©Augustin Gisclard)

Situé sur les berges de l’Aveyron, le château de Bioule est implanté au cœur du village d'une commune rurale de 1 131 habitants dans le département du Tarn-et-Garonne (82). Construit à partir de briques de terre cuite (briques toulousaines reprenant le grand format 42 x 28 x 5cm des briques romaines), de pierres de taille et de moellons de calcaire à la fin du XIIIe siècle, cet imposant édifice défensif sur plan rectangulaire est organisé autour d'une cour bordée par deux ailes bâties à l’ouest et au sud. Deux tours rondes, aujourd’hui arasées, assurent la protection des angles extérieurs de l’aile sud donnant sur la rivière. L’aile ouest, ouverte sur le village, est dominée par une haute échauguette surélevée par un beffroi au XVIIe siècle. Elle se prolonge au nord par un « châtelet » bâti pour défendre l’entrée. Au nord de la cour, subsistent les restes d’une ancienne tour et une chapelle médiévale.

La longue histoire du château a été ponctuée de campagnes de travaux dont les plus importantes furent menées par la famille Cardaillac, seigneurs du haut-Quercy. C’est à eux que l’on doit l’édification de ce bel exemple d’architecture médiévale au caractère à la fois militaire et résidentiel comme le montrent les nombreuses ouvertures sur l’Aveyron. Réaménagé, percé de nouvelles ouvertures et surélevé au XIVe siècle, le château a été embelli par la réalisation de peintures murales au XVIe siècle et de stucs au XVIIIe siècle.

Acquis par la commune en 1889, l’école y sera installée en 1890, la scolarisation devenant obligatoire. Depuis lors, les écoles maternelle et primaire occupent les salles des rez-de-chaussée des ailes sud, ouest et les salles attenantes à la chapelle au nord.

Le château bénéficie d’une protection partielle en 1925. Ce sont les peintures murales du XIVe siècle, situées dans la chapelle, qui sont classées au titre des monuments historiques le 26 juin 1950, avant de faire l’objet d’une première campagne de restauration en 1952.  Au vu de sa qualité architecturale et de l’état de conservation de ses dispositions médiévales, le château de Bioule obtient un classement au titre des monuments historiques, le 28 novembre 1991.

À partir de 2010, la commune de Bioule est confrontée aux enjeux liés aux besoins contemporains d’une école, aux nécessaires mises aux normes et à l’état général du bâtiment. Elle envisage un temps la construction d’une nouvelle école sur un site extérieur au centre ancien. Cependant, afin de préserver ce monument historique tout en conservant l’activité scolaire au cœur du village, la commune décide de réhabiliter une partie du château pour y maintenir l’école. 

Elle s’engage alors dans un projet de restauration des façades, de réhabilitation et de réaménagement partiel des parties inoccupées ou considérées comme présentant un risque de dégradation.

 

 

Figure 2: Vues aériennes du château de Bioule au cœur du village, sur les berges de l’Aveyron.
 (© Ministère de la Culture – Médiathèque du patrimoine) 

 

 

 

 

 

Diagnostic avant travaux

Etat technique et sanitaire du bâtiment 

D’une manière générale, le bâtiment présentait un état sanitaire dégradé, une réhabilitation globale devenait nécessaire pour poursuivre les travaux déjà entrepris en toiture et permettre le bon fonctionnement d’un établissement recevant du public.

Des étais étaient présents dans les caves et au rez-de-chaussée de l’aile ouest afin de consolider les planchers qui avaient subi des déformations. En revanche, les planchers de l’aile sud offraient un état satisfaisant et ne nécessitaient pas d’intervention.

Les épais murs en brique (1,5m en façade ouest et 1,4m en façade sud) ne présentaient pas de problèmes structurels même si certaines briques en partie basse avaient été dégradées par les remontées capillaires. La présence d’enduit ciment sur certaines façades et piliers des galeries, a favorisé la dégradation des briques.

Figure 3 : Façade ouest avant travaux : briques pulvérulentes et dégradation des maçonneries.

 

 

La charpente et la toiture des ailes sud et ouest ayant été restaurées quelques années auparavant, elles étaient dans un état satisfaisant.

Dans la cour intérieure, la galerie du premier étage avait subi des déformations et le garde-corps menaçait de s’effondrer. Des filets de protection avaient dû être installés.

Figure 4 : Filet de protection provisoire installé pour palier la chute des briques de remplissage du garde-corps de la galerie haute

 

Figure 5 : Vue des espaces au premier niveau de l’aile ouest avant réhabilitation

 

Pour des raisons de vétusté, les étages étaient inoccupés. Ils sont accessibles par un escalier situé au nord de l’aile ouest et qui dessert la galerie sur laquelle s’ouvrent les portes de l’étage. Cet escalier, particulièrement raide et étroit, présentait un risque pour les utilisateurs.

Figure 6 : Vue de l'escalier avant les travaux

De façon plus générale, le bâtiment dans son intégralité n’était pas adapté pour accueillir des Personnes à Mobilité Réduite (PMR).

 

 

État énergétique

 

Aucune isolation n’était présente dans l’ensemble du bâtiment. 

Cependant l’importante épaisseur des murs en brique et leur forte inertie contribuaient à améliorer le confort thermique pour les élèves et le personnel scolaire.

Les menuiseries simple vitrage et peu étanches posées au cours des XIXe et XXe siècle n’offraient aucune protection thermique. 

Aucun système de ventilation assistée ou mécanique n’était présent, le renouvellement de l’air intérieur était effectué grâce à une gestion manuelle de l’ouverture des fenêtres, impliquant les usagers et probablement de manière indirecte par les fuites au niveau des menuiseries.

Le système de chauffage se résumait à une chaudière à pellets installée dans le châtelet quelques années avant le début des travaux. Elle permettait de fournir l’énergie thermique nécessaire aux planchers chauffants de l’aile sud et aux radiateurs à eau chaude de l’aile ouest. 

Parmi les dernières problématiques en lien avec un poste de dépense énergétique, figure celle de l’éclairage de salles de classe. L’aménagement des salles datant des années 1960. L’apport en lumière naturelle et artificielle s’avérait insuffisant. La configuration des classes ne permettait pas en l’état des respecter les exigences réglementaires attendues (valeur de l’éclairement, l’indice d’éblouissement, indice de rendu des couleurs).

Figure 7 Salles de classe au rez-de-chaussée de l’aile sud avant réhabilitation

 

 

État patrimonial et architectural

Les éléments patrimoniaux remarquables

 

Figure 8: Aile ouest : l’entrée du château sur la place (1957), la galerie sur cour de l’aile ouest (1927)
 (© Ministère de la Culture – Médiathèque du patrimoine)

 

Le château de Bioule impressionne aujourd’hui par sa monumentalité massive et la régularité de sa volumétrie ainsi que par la présence de nombreux éléments d’architecture et de décoration datant du Moyen Age. Avant l’édification du château, le site était occupé par deux églises, des habitations et des fortifications. L’actuel bâtiment au nord de la cour, témoigne de cette époque antérieure. Sur son côté ouest, des traces d’arrachements signalent un ancien donjon édifié en petit appareil de pierre calcaire. A l’ouest, le chœur de l’église romane perdure alors que sa nef a été transformée en salles.

Le château neuf, édifié au XIIIe siècle, déploie ces deux ailes de 38 et 50 mètres de long aux imposants murs de brique. Au milieu du XIVe siècle, il fait l’objet d’une vaste campagne de travaux au cours de laquelle les élévations sont surélevées d’un étage et les façades sur cour reconstruites. L’aile ouest, peu ouverte sur la place, a été percée de fenêtres à meneaux. L’aile sud, donnant sur la rivière se dresse sur un socle en pierre de taille. Au XIIIe siècle, elle était largement ouverte par une série de fenêtres géminées dont certaines ont subsistées côtoyant les nouveaux percements du XIVe siècle. Les maçonneries laissent percevoir les traces d’éléments défensifs, tels les crénelages, des archères cruciformes. 

 

Figure 9: La façade sud sur l’Aveyron avec les baies géminées du XIIIe siècle et les croisées du XIVe siècle. 

En partie haute, traces de crénelage. (© Augustin Gisclard)

 

 

Une porte fortifiée fut construite au nord de l’aile ouest en intégrant la mise en place d’un assommoir, ouverture en arc, au-dessus du passage permettant le tir vertical. L’échauguette qui côtoie la porte date du XIIIe siècle, elle a été surélevée au XVIIe siècle. Côté cour, des galeries couvertes reposant sur des piles en brique furent aménagées au XIVe siècle. Probablement modifiées, elles constituent encore aujourd’hui le dispositif d’accès aux salles du 1er étage. L’escalier initial se situait dans la cour, côté sud. Ces transformations architecturales ont été accompagnées d’aménagement des intérieurs : cheminées dans les grandes salles, enduits à la chaux. Des décors peints viennent parachever cet ensemble dans la chapelle.

 

Figure 10 L’entrée depuis la place après travaux : l’ouverture dans l’épaisseur de l’arc participe au dispositif de l’assommoir commandé depuis l’étage (voir fig. 12).  La façade est dominée par l’échauguette du XIIIe siècle surélevée au XVIIe siècle et couronnée d’un campanile.

 

Ces ambitieux travaux furent menés par Bertrand IV et Bertrand V de Cardaillac, seigneurs bâtisseurs de nombreuses résidences dans le haut-Quercy au cours du XIIIe et du XIVe siècle. Au XVIe siècle, Antoine II de Cardaillac poursuivit l’embellissement de l’édifice en commandant une décoration à la gloire de chevaliers, représentant les Neuf Preux, pour la salle du rez-de-chaussée de l’aile sud-est dont la qualité de réalisation et de conservation ont concouru à la renommée du château. Peu modifié par la suite, le château de Bioule constitue un remarquable exemple des constructions seigneuriales de ces période de l’histoire.

 

Figure 11 Représentation d'un des chevaliers de la salle des Neuf Preux   (© CREBA)

 

De nombreux éléments remarquables propres à différentes époques sont encore lisibles faisant du château de Bioule un site historique unique. 

  • Ses volumes massifs de brique encadrés de tours avec des traces de dispositifs défensifs (créneaux, échauguette...)

  • Ses fenêtres géminées du XIIIe siècle et ses baies à meneaux du XIVe siècle,

  • La porte d’entrée et son dispositif défensif (« châtelet », assommoir)

  • Sa galerie en bois sur piles en brique dans la cour intérieure,

  • Les hautes salles intérieures avec leurs cheminées,

  • Les décors peints du XVIe siècle au rez-de-chaussée de l’aile sud-est, évoquant les Neufs Preux

  • La chapelle romane au nord décorée de peintures murales du XIVe siècle représentant des scènes de la vie du Christ

 

Figure 12 : Salle de l'assommoir avant et après restauration

 

Les éléments patrimoniaux malmenés

 

A la fin du XIXe siècle, l’aile est et la tour ont été partiellement détruites.

Au fil des aménagements, certains éléments du second œuvre ont été remplacés, quelques ouvertures ont été créées sur la cour.

Les menuiseries du XVIIe siècle étaient encore présentes en 1957, elles ont été définitivement remplacées au cours du XXe siècle et les volets intérieurs en bois ont également été supprimés. L’ajout de volets extérieurs en bois et de stores métalliques est en désaccord avec la typologie des ouvertures.

Figure 13 Menuiseries et volets intérieurs de l’aile sud - XVIIe siècle 
(©Ministère de la Culture – Médiathèque du patrimoine)

 

Côté cour, des ouvertures sur la galerie avec des encadrements en briques ont subi des modifications au cours des siècles antérieurs. Certains encadrements de baies ont été entièrement cimentés, portant atteinte à l’intégrité architecturale et esthétique des ouvertures. Une grande ouverture au rez-de-chaussée de l’aile ouest a été créée avec une poutre IPN apparente.

 

La construction d’une structure en béton au XXe siècle sous la galerie de l’aile ouest (figure 15) impactait la cohérence originelle des piliers de soutien et réduisait la portée de l’espace couvert. En effet le dernier pilier situé au nord de la galerie ouest était entièrement noyé dans cet ajout contemporain. De même plusieurs escaliers en béton de quelques marches ont été ajoutés aux abords de la galerie et de la cage d’escalier sans intégration architecturale. 

L’ajout de ciment sur certaines parties de l’édifice a fortement favorisé la dégradation des briques et altéré les façades ainsi que les fondations de la cage de l’escalier nord. 

L’ensemble des aménagements intérieurs vieillissants des années 1960 ne permettaient aucune mise en valeur du patrimoine intérieur du bâtiment comme les murs, les dalles de terre cuite et les planchers.

 

 

 

 

Projet de réhabilitation

Programme architectural et énergétique 

Cahier des charges du maître d’ouvrage 

 

La mairie de Bioule tenait à ne pas excentrer l’école en construisant un bâtiment neuf à l’extérieur du village. Son objectif était avant tout de maintenir cette activité dans le centre de Bioule en donnant une deuxième vie à ce bâtiment.

Le projet consistait donc en l’aménagement de trois salles de classe, d’un dortoir, de sanitaires et le réaménagement du châtelet nord pour les bureaux de la directrice et la salle des instituteurs à l’étage.

Les demandes de la maîtrise d’ouvrage ont porté sur : 

- La consolidation des différents planchers de l’aile ouest pour permettre un accès sans risque aux élèves et au personnel. Il y avait donc des exigences sur les deux niveaux en termes de portance et de stabilité au feu.

- L’accessibilité au sein du château afin d’être conforme aux exigences imposées par un ERP. Les risques liés à l’escalier principal impliquent donc une restructuration complète de cet espace.

- L’apport de lumière naturelle au sein des salles de classe nouvellement installées à l’étage de l’aile ouest, car rares sont les ouvertures vers l’extérieur. 

 

Ce projet a été l’opportunité de réorganiser et d’optimiser les différents espaces jusqu’à présent dispersés dans les ailes ouest, sud et nord. A ce titre, il était demandé une augmentation de la surface en ayant recours aux espaces du 1er étage de l’aile ouest et du châtelet nord.

Les façades et les galeries côté cour longeant les ailes ouest et sud, ont pu bénéficier d’une restauration au titre des monuments historiques. La chapelle et l’aile est dans laquelle se situe la salle des Neuf Preux n’étaient pas dans le périmètre du projet et n’étaient donc pas concernées par les travaux. Ces espaces ont été maintenus en l’état.

 

En résumé, dans le cadre de ce projet, les espaces suivants ont été réhabilités et aménagés: 

  • l’aile ouest, le rez-de-chaussée et l’étage avec des travaux aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur,

  • le châtelet nord à l’intérieur et à l’extérieur,

  • sur la cour, l’ensemble des galeries ont été restaurées.

 

Figure 14 Plans du rez-de-chaussée et du premier étage . 
Affectation des salles avant et après travaux. ©CREBA

 

 

Acteurs du projet 

 

Les architectes maîtres d’œuvre du projet sont les agences Thoin Architectes et Joëlle Cumin architecte.

Le bureau d’études archéologiques HADES est intervenu pour l’étude historique et l’INRAP pour les fouilles préventives au pied du grand escalier. Elles ont permis de découvrir les traces d’anciens bâtiments à très faible profondeur au niveau de la cour du château. 

Le bureau d’étude structure AIA Ingénierie a permis de déterminer la méthode adaptée pour la consolidation des planchers bois. Les autres bureaux d’études sont SIEA pour la partie fluide/chauffage et MONTET pour l’électricité. Les décors peints ont été diagnostiqués et un bilan thermique avec simulation a été réalisé.

Les artisans ayant travaillé sur l’opération de réhabilitation proviennent du Tarn-et-Garonne, Lot, Lot-et-Garonne et Aveyron.

              

 

Synthèse 

Le programme consiste en une réhabilitation partielle pour l’aménagement de salles de classes, de bureaux, de sanitaires et de dortoirs au sein d’un château du XIIIe siècle. Dans le cadre de ce projet, il était également prévu de restaurer les façades et les galeries situées côté cour.

Il s’agit d’un projet : 

  • A fort intérêt patrimonial intérieur et extérieur, avec des contraintes supplémentaires du fait de son classement au titre des Monuments Historiques ;

  • Qui doit répondre aux exigences d’un ERP de 5ème catégorie pour accueillir une école primaire ;

  • Qui intègre une démarche globale de réhabilitation énergétique responsable en accord avec les caractéristiques d’un site classé.

     

 

 

 

Travaux

Durée des travaux

Les travaux ont débuté en juin 2017 et la livraison a eu lieu en septembre 2019.

 

Structure

Les principaux travaux de structure ont porté sur les galeries sur cour et sur la réhabilitation de l’escalier.

 

Galerie

Une structure en béton avait été ajoutée dans les années 60, au rez-de-chaussée du côté intérieur de la façade ouest. Celle-ci a pu être démolie, permettant l’installation d’une rampe d’accès PMR reliant la cour à la salle de classe située au même niveau. Il a donc été nécessaire de restaurer le pilier rond en maçonnerie de briques foraines auparavant noyé dans cette maçonnerie en béton, car celui-ci contribue au soutien des poutres de la galerie.

La façade du rez-de-chaussée située à gauche de cette ancienne structure en béton avait été modifiée. Il a donc été décidé de la restituer dans son apparence originelle. En effet, lors de la purge des enduits récents, deux baies cintrées (visibles en figure 16) ont été découvertes et ont pu être restaurées.

 

Figure 15 : Aile ouest sur cour. Structure en béton du XXe siècle sous la galerie avant démolition

 

Figure 16 : Aile ouest sur cour - Après destruction de structure en béton, installation de la rampe accès PMR, modification des ouvertures de la façade au rez-de-chaussée et restauration du pilier de soutènement

 

Par la suite, l’ossature en pans de bois et les garde-corps ouest et sud ont été entièrement restaurés.

 

Figure: 17 Aile sud sur cour - Reprise des enduits

Figure: 18 Galerie de l’aile sud côté cour après restauration

Escalier

L'escalier menant à l’étage a été entièrement déposé pour être remplacé.

Figure 19 : Vue sur les maçonneries de la cage du grand escalier après dépose de celui-ci

 

Le pilier gauche en brique foraine a été avancé pour s’aligner au pilier droit existant afin d’accueillir un nouvel escalier. L’ensemble des maçonneries ont donc été reprise sur cette partie de l’édifice.

Figure 20 : Création de l'avancée du pilier gauche en briques foraines

 

Un bardage en bois de châtaigner chaulé ajouré avec un espacement régulier de 5 cm a ensuite été installé entre les deux piliers de la cage d’escalier. Ce bardage est posé sur une ossature en bastaing avec un entraxe de 70 cm qui repose sur des poutres maîtresses espacées de 1 m. Le nouvel escalier en bois de chêne est en colimaçon et conforme aux règles d’accessibilité d’un ERP avec un garde-corps et une main courante en ferronnerie. Il possède aussi des dispositifs PMR avec des clous podotactiles sur chaque palier, des contremarches contrastées et des nez de marches antidérapants.

Figure 21 : Vue sur l'ossature en bois du bardage de l’escalier en vis

 

Une menuiserie en chêne a été créée pour la baie présente sur la façade nord de la cage d’escalier (seule une grille de protection était présente avant les travaux) et la croisée en pierre a été restaurée.

Figure 22 : Grand escalier vu depuis la cour après création du pilier gauche et du bardage en chêne chaulé

 

Murs

Les façades nord, est et ouest de l’aile ouest, dégradées par le temps ont été entièrement restaurées. Les briques manquantes ou abîmées ont été remplacées puis rejointoyées. Les quelques nouvelles briques mises en œuvre par une entreprise locale étaient soit des briques anciennes issues du réemploi, soit des briques neuves patinées de façon à respecter la teinte des briques d’origine. Les trous permettant l’installation d’un boulin (échafaudage en bois) ont été rebouchés. L’ensemble des parements de façade et le campanile ont été restaurés. Des anciennes reprises au ciment étaient toujours présentes autour de certaines baies et ont donc été purgées. La petite adjonction sur la façade ouest est un ajout du XIXe siècle. Ses ouvertures, plusieurs fois modifiées ont été redimensionnées, ses maçonneries en brique réparées.

 

Figure 23 Façade ouest avant restauration

 

Figure 24 : Façade ouest après restauration

 

 

Figure 25 : Vue sur les enduits de la galerie et de la salle de classe du rez-de-chaussée de l'aile ouest.

 

Côté cour, les enduits à la chaux ont été restaurés. A l’intérieur, certains enduits anciens ont été conservés lorsqu’ils portaient des graffitis ou témoignages d’anciennes occupations. Il n’a donc pas été possible d’installer une l’isolation intérieure. 

 

 

Plancher haut

Toutes les poutres du plafond à la française du premier étage de l’aile sud ont été restaurées. Le plancher haut a été isolé avec de la fibre de bois d’épaisseur 24 cm. La résistance thermique de la toiture passe ainsi à 6,3 W/m².K

Figure 26 : Vue sur les poutres du plancher à la française et sur les deux puits de lumière depuis le premier étage

La restauration de la poutraison ancienne du plancher haut a permis la création d’un chemin de visite dans les combles.

 

Plancher intermédiaire

L’ensemble des poutres et solives anciennes du 1er étage de l’aile ouest a été entièrement déposées. Quelques poutres dans un état satisfaisant ont été récupérées pour être installées au rez-de-chaussée. De même, certains carreaux en terre cuite provenant du 1er étage ont été triés puis réutilisés. Afin de respecter les critères incendie d’un ERP 5ème catégorie et les surcharges (300kg/m² pour une salle de classe), il a été nécessaire de créer un plancher collaborant bois-béton.

 

Figure 27 : Vue sur le rez-de-chaussée et le premier étage après dépose du plancher intermédiaire

 

Une nouvelle poutraison a ensuite été posée, permettant la mise à niveau du plancher. Afin d’obtenir une stabilité au feu et une résistance mécanique suffisante, une dalle de compression en béton avec treillis et connecteur est coulée. Par-dessus, un panneau de 8 cm de mousse isolante rigide en polyuréthane est posé, puis est recouvert par le complexe de plancher chauffant accueillant les serpentins. Cette mousse a été choisie par le bureau d’étude structure afin de faciliter la phase de chantier, la mise en œuvre d’un plancher chauffant impliquait de pouvoir circuler sur cet isolant. Une alternative moins impactante d’un point de vue environnementale aurait été des panneaux de liège expansé. La performance thermique du plancher intermédiaire passe à 2.1 W/m².K  Des tomettes sont ensuite posées sur une couche de sable de 5 cm. 

Figure 28 : Détail de mise en œuvre du plancher chauffant sur solivage bois (source : AIA Ingénierie)

Ce complexe composé de solives en bois, de connecteurs et d’une dalle béton a permis de respecter les exigences réglementaires de portance et de stabilité au feu, tout en laissant les poutraisons apparentes. Ce qui a permis d’éviter l’usage de faux-plafonds. C’est un système pertinent pour mettre en valeur les solivages. En revanche, l’épaisseur supplémentaire (dalle, isolant, réseaux) nécessite un abaissement du niveau des solives pour maintenir le niveau de plancher initial. Par conséquent, cette intervention qui implique de recréer des empochements pour intégrer les nouvelles solives dans les murs, est une action lourde. Celle-ci a été possible du fait de l’état de dégradation très avancé des planchers existants.

 

 

Figure 29 Vue sur le premier niveau de l'aile ouest avant et après réhabilitation

 

Plancher bas

Le plancher bas a subi un traitement identique à celui du plancher intermédiaire. Cependant, certaines poutres encore en bon état ont pu être conservées et d’autres récupérées de la poutraison du premier étage ont pu être réutilisées.

 

Menuiserie

Les interventions sur les menuiseries ont porté sur la création de fenêtres de toit et le changement des fenêtres en façade.

Le côté cour du premier étage ne bénéficie d’aucune ouverture, l’éclairage se fait donc uniquement par la façade ouest qui ne peut être modifiée du fait du classement Monument Historique du bâtiment. Pour augmenter l’apport de lumière naturelle dans les classes, il a été décidé de jouer sur la lumière zénithale grâce à l’installation de verrières en toiture. L’installation de quatre puits de jour en toiture permet donc d’apporter davantage de lumière naturelle dans les deux nouvelles salles de classe du 1er étage lors de la première moitié de la journée. Ces quatre verrières ont été installées dans la continuité des travées existantes au niveau du pan est de la façade ouest. 

 

Figure 30 : Installation des verrières au niveau des combles versant est de l’aile ouest.

 

Figure 31 : Vue de la verrière à travers les solives du plancher haut. (© CREBA)
 

 

Pour les façades, les menuiseries en chêne ont été refaites à neuf avec du double vitrage mince (12 mm ) et du verre étiré. Elles sont composées d’ouvrants plein vitrage et de volets intérieurs afin de rester au plus près des dispositifs d’origine. Les encadrements extérieurs des baies du rez-de-chaussée ont été restaurés en maçonnerie de brique foraine et les croisées en pierre ont été restaurées à l’identique.

Côté cour, la forme cintrée des baies ogivales a pu être respectée grâce à des portes fenêtres en verre feuilleté avec des profilés métalliques ultra minces, réalisées sur mesure. 

La teinte, « sang de bœuf », choisie pour l’ensemble des volets intérieurs et des menuiseries, est une couleur qui s’associe bien avec le coloris des briques et tout en rappelant les teintes en usages à l’époque médiévale. Cette teinte est un clin d’œil à l’histoire du bâtiment et un geste esthétique qui permet de démarquer les éléments contemporains apportés à l’édifice.

 

 

Figure 32 : Baies de la façade ouest avant et après restauration 

 

Figure 33 :Porte vitrée avec cadre métallique donnant sur la galerie à l’étage (© CREBA)

La performance thermique des fenêtres double-vitrage varie en fonction des dimensions des ouvertures, entre 1,49 W/m².K et 1,88 W/m².K.

 

 

Chauffage et eau chaude sanitaire (ECS)

Les deux niveaux de plancher chauffant sont reliés à l’ancienne chaudière à pellets située dans le châtelet, qui possédait la puissance nécessaire à la gestion de tous les planchers chauffants et des radiateurs à eau situés dans le châtelet.

Figure 34 Chaudière à pellets

 

Ventilation 

Une VMC simple flux hygrovariable avec un extracteur a été installée dans les combles avec une seule gaine verticale. 
Pour le reste du bâtiment, la gestion de la ventilation se fait grâce aux fenêtres.

Les soupiraux permettent de ventiler les caves et de limiter ainsi l’humidité dans le sous-sol. Cet espace semi-enterré est maintenu vide à l’exception d’un local dans la partie nord, qui abrite une partie du réseau de chauffage associée aux plancher chauffant.

 

Aménagement intérieur 

Les aménagements intérieurs portent sur le rez-de-chaussée et le premier étage de l’aile ouest. 

Au rez-de-chaussée, le mur séparant l’ancienne classe du rez-de-chaussée de l’aile ouest a été détruit afin d’annexer la salle adjacente, passant ainsi d’une surface de 47m² à une surface de 67m² et permettant l’accès à une seconde fenêtre située en façade ouest. Les anciens sanitaires présents au nord de la cour ont été détruits. Les nouveaux sanitaires plus spacieux ont pu être aménagés à l’intérieur du bâtiment.

 

Figure 35 : Organisation des salles de classes et sanitaires avant et après réhabilitation (source : Stéphane Thouin Architecture)

 

Figure 36: Vue de la salle de classe et des sanitaires situés au rez-de-chaussée de l'aile ouest

 

A l’étage, deux grandes salles de classe ont été aménagées. Elles sont accessibles un hall donnant sur la galerie. Les dispositions médiévales qui avaient subsistées dans ces espaces abandonnés, ont pu être conservées et intégrées aux aménagements. On trouve ainsi de grandes cheminées et des baies à coussièges. Les enduits existants portaient des traces d’occupations antérieures (gravures, graffiti, dessins). Ils ont été consolidés et laissés apparents lorsqu’ils étaient en parties hautes, en parties basses, ils ont été protégés derrière des cloisons en plâtre qui permettent l’affichage pour l’usage scolaire.

Chacune de ces classes est éclairée par une seule grande baie à l’ouest avec un apport de lumière zénithale traversant les solives du plafond à la française.

 

Figure 37 : Une baie à coussiège dans la salle de classe de l’étage de l’aile ouest

 

Figure 38 : une cheminée et des traces d’enduits anciens conservés dans une salle de classe de l’étage de l’aile ouest

 

On trouve également à l’étage du « châtelet » le bureau de la direction, aménagé en conservant les dispositions médiévales telles que l’ouverture de l’assommoir.

 

Bilan de la réhabilitation

Consommations après travaux 

En théorie

Niveau de performance énergétique théorique

Avant travaux, le niveau de consommation était d’environ 104 kWhEP/m²/an, ce qui correspondait à une étiquette-énergie de classe C. Après travaux, les performances sont estimées à 52 kWhEP/m²/an, ce qui permet d’atteindre le niveau BBC Rénovation.

La forte inertie thermique des murs et le climat doux de la région permet de conserver des températures intérieures très agréables tout au long de l’année, ce qui permet notamment un très bon confort d’été. 

Figure 39 Etiquette énergie et carbone avant travaux

 

Figure 40 Étiquette énergie et carbone après travaux (CREBA)

 

 

Reconnaissances obtenues

Le projet n’a pas fait l’objet de reconnaissances spécifiques ou labélisation.

 

Bilan financier 

Ainsi, la réhabilitation du château aura coûté 1 214 318, 31 €, dont 80 % du budget de ce projet provient de divers financements : Etat, monuments Historiques, région, Département, aides aux titres des écoles, amélioration énergétique. Les 20 % restants proviennent de la commune de Bioule.

Figure 41 : Bilan financier des travaux HT (CREBA)

 

Difficultés rencontrées

Le fait que le château soit classé Monument Historique et qu’il soit le siège d’une école primaire a impliqué de nombreuses études préventives archéologiques notamment en phase chantier avec un sondage du sol avant la mise en œuvre de fondations pour le pilier gauche de la cage d’escalier.

 

Une des difficultés de chantier a été la pose des câbles électriques et canalisations qui ne peuvent pas passer dans les murs classés. La majorité d’entre eux sont donc intégrés directement dans l’épaisseur des planchers ou le sol.

Afin de conserver la continuité pédagogique, l’école a été séparée en deux parties. Les élèves se trouvaient dans l’aile sud ou dans des caissons modulables provisoires pendant que les travaux s’effectuaient dans l’aile ouest. Cela a été possible en grande partie grâce aux multiples entrées du château.

Un rythme soutenu de travail a été nécessaire durant la phase de travaux afin de pouvoir livrer le bâtiment réhabilité dans les délais imposés. Il est important de noter que le travail de l’ensemble des artisans a été très apprécié malgré le niveau de difficulté du projet notamment pour l’entreprise de gros-œuvre. La motivation du maire d’ouvrage, le soutien des différents acteurs et l’engagement de l’équipe de maîtrise d’œuvre ont permis à ce projet d’aboutir et de valoriser cet impressionnant édifice.

 

Figure 42 Château de Bioule au bord de l’Aveyron (© pays Midi-Quercy, Conseil départemental du Tarn-et-Garonne, Inventaire général Région Occitanie)

 

Maîtrise d’ouvrage :  Gabriel Serra, maire de Bioule
Maîtrise d’œuvre : Nicolas Calandre – Stéphane Thouin Architecture
Consommation énergétique :
 

 Avant travaux : 104 kWh/(m².an)

 Après travaux : 52 kWh/(m².an)

 

  

Rédacteur de la fiche : Anissa BEN YAHMED (Cerema Est) Yannis PALMADE (Cerema Sud-Ouest) Nathalie PRAT (ENSA Toulouse).

Sources photographiques et graphiques : Agence Stéphane Thouin Architecture, sauf mention contraire.

Sources bibliographiques, sitographie : 
Joy D., Séraphin G., Bioule, château : architecture, Congrès archéologique de France, 170e session, Tarn-et-Garonne, 2012, Société française d’archéologie, Paris.

Le château de Bioule, Pays Midi-Quercy ; (c) Conseil départemental de Tarn-et-Garonne ; (c) Inventaire général Région Occitanie

Plus d’informations :

Site internet
Courriel

 

44.090278, 1.539167

Bioule (82) - Réhabilitation d'un chateau médiéval pour accueillir une ecole primaire

pour en savoir plus

 

 

Cette fiche a été réalisée dans le cadre du projet CREBA – Centre de REssources pour la réhabilitation responsable du Bâti Ancien, soutenu par le Programme ministériel d’Action pour la qualité de la Construction et la Transition Energétique (PACTE). Il est piloté par le Cerema aux côtés de 4 partenaires : l’école des Arts et Métiers Paris Tech, le Laboratoire de Recherche en Architecture de l’ENSA de Toulouse, les associations nationales Maisons Paysannes de France et Sites et Cités Remarquables de France.